mercredi 27 mai 2009

Retour sur Mesurer le Monde



Voici quelque temps, j'avais publié une entrée sur le beau livre de Ken Alder Mesurer le monde publié en poche par Champs Flammarion.

J'ai eu l'opportunité de le relire et j'ai été à nouveau émerveillé par la qualité du travail de cet historien des sciences qui a recueilli les matériaux de son livre, non seulement sur les archives, mais aussi sur le terrain, parcourant à bicyclette l'itinéraire des deux savants français qui ont mesuré l'arc du méridien qui va de Dunkerque à Barcelone.

J'invite mes visiteurs une nouvelle fois à lire ce livre qui est exemple d'érudition mis à la portée de tous dans un style amène et pédagogique à la fois.

Une des pages les plus brillantes de ce travail est l'explication qu'il donne des mesures d'Ancien régime et de leur raison d'être qui explique la résistance universelle à les abandonner au profit du mètre. On retrouve cette attitude dans les défenseurs des mesures anglo-saxonnes.

De nombreuses mesures de l'Ancien Régime, notamment celles qui étaient liées au monde de la production, avaient à l'origine une signification anthropométrique, dérivée des besoins ou des intérêts de l'homme. Cela ne voulait pas dire pour autant qu'elles reflétaient les mensurations du corps humain et que le pied, par exemple, était aussi long que le pied du roi ou qu'un pied humain moyen. En revanche, bien souvent, un grand nombre de ces mesures représentaient la quantité de travail qu'une personne pouvait accomplir dans un laps de temps donné. Ainsi, dans telle région, le charbon était-il mesuré en charges, équivalentes chacune au douzième de la production journalière d'un mineur. La terre arable étaient souvent mesurée en hommées ou en journées, désignant la surface qu'un paysan pouvait labourer ou moissonner en un seul jour. D'autres unités exprimaient la valeur ou les qualités d'un terrain, selon l'estimation des paysans du coin [quelle vilaine traduction!]. Ainsi, la surface d'une terre arable pouvait-elle être également mesurée en boisselées : dans ce cas le terrain avait une superficie égale au nombre de boisseaux de grain nécessaires à son ensemencement. (…) Il arrivait que des propriétés décrites en arpents dans les documents officiels fussent dans la pratique divisées en journées, rendant ainsi impossible toute comparaison avec un autre terrain pour lequel on aurait utilisé des mesures abstraites.

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